Pour une (re)distribution des invendus alimentaires

Illustration : Anne-Catherine

La crise éco­no­mique euro­péenne, les mesures d’austérité impo­sées en Bel­gique fra­gi­lisent de plus en plus de citoyens, plongent cer­tains dans la pau­vre­té. Cer­taines per­sonnes éprouvent même des dif­fi­cul­tés à se nour­rir. Dans le même temps, les grandes sur­faces jettent leurs inven­dus ali­men­taires non périmés.

Le gaspillage organisé en système

Le gas­pillage ali­men­taire se passe à plu­sieurs niveaux. Au niveau indi­vi­duel tout d’abord, quand les consom­ma­teurs achètent trop, ne pla­ni­fient pas leur repas, n’accommodent pas leurs restes ou appliquent de manière trop dra­co­nienne les dates limites de consom­ma­tion… C’est la forme de gas­pillage la plus visible, qui en cache d’autres, plus organisées.

Le gas­pillage ali­men­taire s’intègre en effet dans un sys­tème de pro­duc­tion. Une agri­cul­ture indus­tria­li­sée, où de nom­breux inter­mé­diaires inter­viennent, laisse la part belle au gas­pillage. Les choix poli­tiques, liés à ce sys­tème jouent éga­le­ment leur rôle.

Au niveau com­mer­cial, d’autres élé­ments inter­viennent aus­si : le cali­brage et l’aspect visuel des fruits et légumes (avez-vous déjà vu un concombre tor­du dans votre super­mar­ché ? Une pomme tâchée ou minus­cule comme cer­taines de vos ver­gers ?). Ce sont aus­si les règle­ments d’une poli­tique de sécu­ri­té ali­men­taire trop rigide, ain­si que des logiques com­mer­ciales qui accen­tuent le gas­pillage : l’on reti­re­ra des ali­ments des rayons même s’ils ne sont pas péri­més, car les clients ne vont plus les ache­ter ; un embal­lage alté­ré, un car­ton cogné, une pomme abî­mée… autant de den­rées ali­men­taires qui fini­ront dans les pou­belles de nos supermarchés.

Déchets ou pas déchets ?

Une direc­tive euro­péenne (2008/98/CE) impose un ordre prio­ri­taire dans le trai­te­ment des déchets : il s’agit d’abord de ne pas créer le déchet, c’est qui est appe­lé, dans ladite direc­tive, la pré­ven­tion. S’il est vrai­ment impos­sible de ne pas créer le déchet, il s’agira ensuite d’envisager prio­ri­tai­re­ment le réem­ploi, ensuite le recy­clage, la valo­ri­sa­tion éner­gé­tique, et enfin l’élimination.

Cette direc­tive a été trans­po­sée en décret au niveau wal­lon (Le décret du 10 mai 2012 trans­po­sant la Direc­tive 2008/98/CE…) et bruxel­lois, ren­dant obli­ga­toire cet ordre de trai­te­ment sur les ter­ri­toires en question.

Herstal, un exemple pour la wallonie et bruxelles

C’est au nom de cette direc­tive que la com­mune d’Herstal et son bourg­mestre Fré­dé­ric Daer­den ont impo­sé aux super­mar­chés pré­sents sur son ter­ri­toire le don des inven­dus ali­men­taires aux asso­cia­tions membres de la fédé­ra­tion des Banques ali­men­taires. Plus pré­ci­sé­ment, le per­mis d’environnement d’une grande sur­face, arri­vé à terme, la com­mune d’Herstal a condi­tion­né le renou­vel­le­ment de celui-ci à une clause concer­nant les inven­dus alimentaires.

Depuis lors, la com­mune a éten­du la déci­sion à toutes les grandes sur­faces pré­sentes sur le ter­ri­toire. Concrè­te­ment, les super­mar­chés ont le choix de l’organisme membre de la banque ali­men­taire avec lequel il veut trai­ter, mais ne peut plus mettre à la pou­belle des den­rées encore consom­mables. Bien sûr, les règles sani­taires doivent être res­pec­tées, comme pour tout autre ali­ment, et Hers­tal assure un sui­vi de l’application de cette nou­velle règle communale.

La com­mune d’Herstal a donc ingé­nieu­se­ment détour­né une direc­tive de type envi­ron­ne­men­tal pour l’utiliser dans un but social, répon­dant à une ques­tion de jus­tice sociale en ces temps de crise et de mesures d’austérité impo­sées : le don de den­rées ali­men­taires consom­mables non péri­mées aux plus précarisés.

Généraliser l’exemple, comment ?

L’initiative de la com­mune d’Herstal n’est cepen­dant pas encore obli­ga­toire. Car si pour la plu­part des citoyens, le lien paraî­tra évident, rien n’est dit dans la directive/le décret régio­nal sur le fait que les inven­dus ali­men­taires sont des déchets.

Le groupe PS du Par­le­ment wal­lon a donc dépo­sé une pro­po­si­tion de décret, visant à rendre obli­ga­toire le don des inven­dus alimentaires.

En sou­tien à cette pro­po­si­tion, chaque bourg­mestre peut dès aujourd’hui étendre le dis­po­si­tif de la com­mune d’Herstal à sa com­mune. Dans le cadre de sa cam­pagne « Inven­du mais pas per­du ! », PAC inter­pelle en ce moment tous les Bourg­mestres, Col­lèges et Conseils com­mu­naux wal­lons et bruxel­lois autour de cette démarche, tout en met­tant à leur dis­po­si­tion, via un site inter­net, un petit manuel d’accompagnement à sa réalisation.

Invendu mais pas perdu ! Pour une (re)distribution des denrées alimentaires non périmées

En cette fin d’années 2012, PAC mène campagne sur la possibilité d’étendre l’initiative de la commune d’Herstal à toutes les communes de Wallonie et de Bruxelles.

Vous pouvez signer la pétition qui demande à votre commune d'appliquer le don des invendus alimentaires ici : www.caddyminimumgaranti.be

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