« Les choses telles qu’elles vont nous disent la barbarie à venir.
Nous vivons dans une société de plus en plus brutale et déshumanisante, soumise à une violence voulue comme telle, qui a pour but de diviser, de séparer et d’éliminer, d’imposer la domination sans partage des puissants. Nous vivons sur une planète dont le bouleversement climatique menace d’ores et déjà l’existence même de centaines de millions d’humains et de multiples autres espèces. Nous n’avons plus le choix. Nous n’avons plus le temps de tergiverser. Nous ne pouvons continuer à endurer cette vision mortifère d’un monde où la seule perspective serait de voir grimper les degrés et diminuer les ressources et les solidarités. Le manifeste que vous allez lire nous propose de reprendre en main notre avenir politique, en construisant ensemble un pays dans le pays.
Ce que nous entendons par là, vous le découvrirez dans les pages qui suivent. Mais il est sans doute déjà utile de préciser ici que la préservation des chances de survie de l’humanité constitue, via l’invention de formes nouvelles de gouvernements et d’économies, l’objectif final, à la fois culturel et politique, du pays dans le pays.
La mise sur pied de ce pays dans le pays suppose de rompre radicalement avec le capitalisme, système économique, politique et culturel qui est non seulement à l’origine de la situation gravissime que nous vivons, mais qui se donne également pour sa solution en prônant, contre toute raison, l’exploitation ultime de ce qui reste à exploiter, en ce compris les êtres humains comme matière dernière. Pour construire un pays dans un pays, il s’agit bien sûr de préserver les matières collectives qui sont notre bien commun, comme la sécurité sociale. Mais nous ne pouvons pas nous contenter de ce qui existe encore (un peu) : nous devons inventer de nouveaux communs. Il nous faut en outre reconquérir des territoires politiques, la rue, les quartiers, les champs, les usines, les bureaux. De toute cette matière, nous devons enfin être en mesure d’établir un récit qui exprime notre réalité et notre histoire propres, et pas celle des puissants.
Ce manifeste, adopté par l’assemblée des Actrices et Acteurs des Temps Présents mais ne lui appartenant pas, est déjà en soi un commun sur lequel viendront se greffer de nombreuses boutures. Une matière vivante susceptible de se nourrir des expériences, des combats, des réflexions de chacun. En soi, ce manifeste est réputé n’être pas terminé et est susceptible de ne l’être jamais.
C’est d’ailleurs pourquoi l’on trouvera, sur le site des AAdTP, à côté du texte imprimé dans ces pages, une série de commentaires (chez les anciens, on disait des scolies) qui permettront d’en approfondir ou d’en illustrer la portée.
Mais ce manifeste est surtout un appel à travailler à la construction d’une autre légitimité, ici même et maintenant. Non pas en créant de petites îles ou des refuges reclus à l’écart du monde, mais en étant pleinement ancrés dans un présent qui voudra constituer et préserver une mémoire pour le futur.
Nous sommes notre propre proposition. »
L’ensemble du texte est disponible en ligne sur acteursdestempspresents.be Toutes vos interventions et réactions sur ce manifeste sont les bienvenues.