
Peut-être tout est-il dit avant même que l’on s’immerge dans l’ouvrage : la couverture est une clé — celle du double : Anaïs Nin, son journal à la main au-dessus et sous « la mer des mensonges ». Peut-être encore la 4ème de couverture raconte-t-elle ce qui à nos yeux, et par delà sa réputation d’auteure érotique, fait tout l’intérêt de l’œuvre d’Anaïs Nin qui écrit « Chaque homme à qui j’ai fait lire mes textes a tenté de changer mon écriture. Écrire comme un homme ne m’intéresse pas. Je veux écrire comme une femme. Je dois plonger loin de la rive pour trouver les mots… sous la mer des mensonges ». Et, en effet, elle ira fort loin Anaïs Nin, parfois jusqu’à choquer les lecteurs contemporains pris dans la « libération de la parole » et la dénonciation bienvenue des abus sexuels en tout genre. Léonie Bischoff a choisi un angle très spécifique, celui de l’éclosion de la fleur Nin — quelque peu vénéneuse et pourtant si délicatement précautionneuse. Et à cette ambivalence répond un travail graphique remarquable, qui oscille entre le quotidien et la plongée quasi onirique « sous les mers des mensonges ». Où sans doute ne trouve-t-on guère qu’une vérité, celle de l’auteure Nin… Mais elle en vaut la peine.
Jean-François PontegnieAnaïs Nin. Sur la mer des mensonges.
Léonie Bischoff
2020, Casterman