Depuis l’arrivée du Code des Sociétés et Associations en 2019, décidé avec bien peu de consultation, le secteur associatif en Belgique est menacé jusqu’à son existence même. Quelles conséquences déjà palpables sur le terrain et dans nos pratiques quotidiennes d’ASBL d’un texte qui met en péril le « SBL » ? Et, alors qu’on a fêté il y a peu le centenaire de la Loi du 27 juin 1921, que peut-on faire face à une tentative de délégitimation de l’action associative que constate tout le secteur ? Celle-ci ne date pas de ce nouveau code qui n’en est en somme que le parachèvement d’un long processus de marchandisation du non marchand. Pour tenter de traiter ces deux questions, « Autonomie associative menacée », un ouvrage édité par la FESEFA (la Fédération des employeurs des secteurs de l’éducation permanente et la formation d’adultes) se compose de deux parties. La première (qui n’est pas signée, mais pour laquelle on imagine une écriture collective de la part de l’équipe de la FESEFA) revient sur les spécificités de l’action associative : son histoire, ses évolutions et ses enjeux y sont présentés dans une synthèse très claire. On perçoit bien comment le néolibéralisme — et singulièrement quelques-unes de ses modalités comme le new management et la logique de projets — a colonisé la sphère associative, menaçant la liberté associative pourtant bien nécessaire à toute société démocratique. La deuxième partie réunit des contributions d’acteurs et actrices, membre d’ASBL ou analystes, qui évoquent des problématiques de divers secteurs (EP, santé,…) et décortiquent le nouveau code et les idéologies qui le sous-tendent. Il s’agit aussi de réaffirmer le modèle associatif et d’élaborer des stratégies permettant d’échapper aux contraintes – nouvelles comme anciennes. Des ruses bien nécessaires, car, à défaut d’une réécriture de la loi ou d’une évaluation démocratique de celle-ci comme le réclame la FESEFA, il va sans doute bien falloir fonctionner avec ce nouveau code en vigueur. Et sans doute malgré lui. L’enjeu ? Rien de moins le fait qu’une asso ne devienne pas une entreprise comme les autres et continue d’être un espace de recherche, d’expérimentation, d’utopie en dehors de la sphère marchande. Notons par ailleurs la sortie récente d’un autre outil sur la question, « 2121, Hypothèses, Associations », film documentaire de Michel Steyaert et qui traite lui-aussi du devenir de l’associatif. Tout comme le livre de la FESEFA il est très didactique. Ensemble, livre et film peuvent venir utilement donner, aux professionnel·les comme à leurs publics, une vision d’ensemble des mutations en cours du secteur associatif belge. Et nous faire sentir tout ce qu’on a à perdre.
Aurélien BerthierAutonomie associative menacée – Des défis et ambitions pour garantir nos libertés
Ouvrage collectif
Couleurs livre / FESEFA, 2021