Contre l’allocation universelle s’attache à révéler les erreurs de raisonnement des projets de gauche de « revenu universel » et les dangers de ceux de droite. S’il est positif que l’allocation universelle, dont le principe est l’octroi à tous d’un revenu identique de manière inconditionnelle, ramène à l’avant-plan l’idée selon laquelle il faut un revenu minimum, il met dans tous les cas la sécurité sociale dans la ligne de mire. Le revenu de base est aussi souvent présenté comme un levier de négociation pour les travailleurs. Or, à partir du moment où les travailleurs disposent déjà d’un revenu, l’employeur risque de diminuer les salaires (ce qui est une manière d’assécher la sécurité sociale). En outre, l’allocation universelle est une notion fondamentalement productiviste, car puisqu’il s’agit d’un revenu de transfert, le PIB devra fortement augmenter pour la financer, rendant nécessaire plus de croissance. De plus, l’allocation universelle est régie par l’idée de l’égalité des chances tandis que la sécurité sociale est régie par celle de l’égalité (de chacun selon ses ressources, à chacun selon ses besoins). Ce point est important : être favorable à l’allocation universelle revient à abandonner l’égalité comme pierre angulaire de la gauche. Publié alors que le revenu universel est d’actualité (votation en Suisse, expérimentation en Finlande) et est censé renouveler l’offre programmatique à gauche (il est par exemple porté par le candidat PS-ELLV aux élections présidentielles françaises), ce livre défendant une position progressiste contre lui, permet d’en relativiser la portée et les intentions. Car derrière l’allocation universelle se cache un interventionnisme néolibéral visant à étendre la sphère marchande par la mise à l’encan des éléments constitutifs de l’Etat social.
Olivier StarquitContre l’allocation universelle
Matéo Alaluf et Daniel Zamora (Dir)
Lux, 2017