Hors jeu : Chronique culturelle et féministe sur l´industrie du sport professionnel

Florence-Agathe Dubé-Moreau

Comme un grand nombre de domaines dans notre socié­té patriar­cale, le sport a été pen­sé par et pour les hommes, et c’est ce qu’il donne à voir. L’offre télé­vi­suelle du sport fémi­nin reste mar­gi­nale alors que les femmes repré­sentent près de 40 % des ath­lètes à tra­vers le monde. Arbitres, entraî­neuses, diri­geantes de club, elles sont peu nom­breuses à occu­per des postes à res­pon­sa­bi­li­té et font encore très, trop sou­vent, office de faire valoir et de pion­nières. Quelle consé­quence cette invi­si­bi­li­sa­tion des femmes a‑t-elle sur l’activité phy­sique et sa pra­tique ? Pour­quoi le genre mas­cu­lin y est-il le genre par défaut ? Et sur­tout, qu’est-ce que le sport fait aux femmes ? Ancré dans le sport tel qu’il est vécu en Amé­rique du Nord, Hors jeu n’en est pas moins uni­ver­sel tant ce qui est évo­qué nous semble tou­cher l’ensemble du monde. Com­bien de femmes arbitres de foot­ball au sein de la FIFA ? Com­bien d’entraîneuses d’équipe d’hommes ? Mais aus­si d’équipes de femmes, en fait ! His­to­rienne de l’art, mais aus­si com­pagne d’un foot­bal­leur amé­ri­cain de haut niveau, Flo­rence-Agathe Dubé-Moreau pro­pose une vaste étude où l’on com­prend que « les sports, comme les arts, nous parlent des socié­tés dans les­quels ils s’inscrivent, puisqu’ils ont été créés par celles-ci et que leurs règles ne font sens qu’au sein d’une com­mu­nau­té don­née. ». Après avoir vécu plu­sieurs années dans le milieu, l’autrice offre un regard situé et expé­rien­tiel sur la manière dont le sport pro­fes­sion­nel invi­si­bi­lise et dépré­cie les femmes et leur tra­vail, qu’elles soient ath­lètes, com­pagnes de spor­tifs qui gèrent tout ce qui relève de la sphère pri­vée de leurs spor­tifs de maris/fiancés/amoureux pour qu’ils puissent ne se concen­trer que sur leur car­rière, arbitres ou diri­geantes. L’autrice déve­loppe tout au long de son ouvrage une approche anthro­po­lo­gique dans laquelle le jeu spor­tif est non seule­ment à appré­hen­der comme un « pro­duit cultu­rel » mais aus­si comme un « pro­duc­teur cultu­rel ». Ain­si écrit-elle : « les sports per­for­me­raient nos socié­tés, en en recon­dui­sant les codes, les valeurs, et, simul­ta­né­ment, influe­raient à leur tour sur elles, en pro­dui­sant de nou­velles pos­si­bi­li­tés ». Il s’agit éga­le­ment de dénon­cer cette glo­ri­fi­ca­tion du patriar­cat que dif­fuse, célèbre et conso­lide le sport au tra­vers de son mode de fonc­tion­ne­ment et de celui de ses dif­fu­seurs et finan­ciers. Et de nous faire prendre conscience du fos­sé qui se creuse entre le monde du sport pro­fes­sion­nel et les chan­ge­ments de valeur sur le plan de l’égalité de sexe et de genre qui s’opèrent actuel­le­ment dans la société.

July Robert

Hors jeu : Chronique culturelle et féministe sur l´industrie du sport professionnel
Florence-Agathe Dubé-Moreau
Remue-ménage, 2024

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