
Ce n’est pas tous les jours qu’un président de parti en exercice publie un manifeste politique. Le défi est de taille en effet, à une époque où les débats idéologiques se réduisent à des « clashs » via les réseaux sociaux. La vie large, le livre en question, est une pierre à l’édifice d’un socialisme revigoré, et repensé à l’aune de la crise climatique. Paul Magnette y avance une série de propositions, après avoir établi le cadre dans lequel cet aggiornamento doit se produire. L’auteur émet ainsi une critique double : celle d’un socialisme arcbouté sur la défense d’un modèle de société productiviste et d’une sécurité sociale perçue, non pas comme une force de progrès, mais comme une forteresse assiégée. Et celle d’une écologie politique individualisante et injonctive, foncièrement inique et socialement injuste. Mais l’écosocialisme, pour advenir, devra se situer au point de convergence de luttes, encore trop éparses, qui constituent pourtant la matrice du combat anticapitaliste aujourd’hui : égalité femmes-hommes, féminisme intersectionnel, antiracisme, décolonialisme, agroécologie, etc. etc. Contre une éthique de la sobriété imposée d’en haut, Paul Magnette propose, dans le sillage d’un Tanuro par exemple, de redéfinir les modes de production de l’économie marchande, plaidant pour une planification démocratique – où ce sont les citoyens et les citoyennes qui décident –, des besoins communs (production agricole, alimentation, énergie, biens de consommation, etc.). La crise climatique ne fait que renforcer les injustices sociales, rendant la vie des gens de plus en plus étriquée. Il est donc temps de redéfinir les moyens d’action d’un socialisme qui puisse faire face à la logique du capitalisme vert. C’est là tout l’enjeu de l’écosocialisme qui, plus qu’un programme partisan, constitue un véritable projet de société.
Denis DargentLa vie large – Manifeste écosocialiste
Paul Magnette
La Découverte, 2022