Deux minutes quarante seconde d’appel pour 0,85 centimes d’euros, voilà la seule donnée utile pour les travailleurs et travailleuses de call center dépeints dans cette nouvelle fable sociale de Celestini. Dans ce récit, on nous plonge — non sans stress — dans le quotidien violent et déshumanisé d’un centre d’appels italien. Deux tensions de notre société se mêlent à travers une mise en scène minimaliste, presque intime : le démembrement du travail et du salariat d’un côté, et le sexisme de l’autre. Un texte dense et sans répit, comme les écrit si bien Celestini, qui empêche presque de penser, qui frappe comme une claque mais qui nous reste en tête, qui nous questionne sur le monde et ses dérives. Bruno Iacopo, l’acteur et Salomé Crickx, l’actrice incarnent des personnages tristes et désabusés, presque pathétiques. Sur fond de restructuration, de négociation et de renoncement, ce récit met en lumière un retour à des conditions de travail qu’on pensait révolues et qui se réinstallent insidieusement dans des secteurs de l’ombre au détriment des travailleurs et travailleuses précarisé·es. Si le call center est un symbole bien connu de la crise du salariat et de la concertation sociale, il est bon de rappeler que nous avons tous et toutes intérêt à résister à cette précarisation du travail qui fait tâche d’huile et grignote peu à peu tous les secteurs.
Sarah de Liamchine
Luttes des classes
Une pièce d’Ascanio Celestini, adaptée et jouée par Iacopo Bruno & Salomé Crickx
Théâtre des martyrs, 2018