
Se laisser happer par l’histoire de Sofie, c’est plonger dans l’univers amstellodamois d’une grande adolescente qui entre à tâtons dans la vie adulte. Pleine d’humour et sans fard, la narratrice n’élude aucun de ses questionnements et raconte comment être une femme, pour elle, ne va pas de soi. D’ailleurs, c’est sous le nom de Tobi Lakmaker et non de Sofie qu’est publié ce roman doux et puissant Ma sexualité en toutes lettres. Sofie rêvait de devenir une grande écrivaine, et Tobi l’a fait ! Dans un langage parfois cru mais jamais provoquant, Sofie raconte ses doutes et ses interrogations dans un monde binaire dans lequel elle navigue et a du mal à tenir le cap. Ainsi que l’affirme Tobi dans sa préface « On a beau détenir toutes les réponses possibles et imaginables, quand on ne détient pas la bonne question, on ne fait que parler dans le vide. Cela, j’ai fini par le découvrir. Ce que j’ai fini par découvrir, c’est qu’il y a des réponses qui précèdent une question donnée. Et tant que ces réponses ne sont pas correctes, on n’a qu’une chose : on a tort. » Dans ce texte d’une grande pudeur malgré le ton souvent provocateur, Sofie interroge la judéité (sa mère n’étant juive que de père, comme elle le dit), la grande littérature, la mort ou encore la philosophie pour aborder les hauts et les bas de la vie, du drame de la perte de sa mère évoqué sans aucun pathos à la joie de ses rencontres amoureuses partagée en toute simplicité. Perdue, bonne à rien, incapable de trouver sa place, et pourtant tellement juste dans sa littérature, Sofie, qui a depuis transitionné, nous emmène dans un récit autobiographique qui tend à l’universel tant il révèle la complexité de l’entrée dans la vie adulte.
July RobertMa sexualité en toutes lettres
Tobi Lakmaker
La peuplade, 2024