
Quand deux auteures – Virginie Ollagnier et Carole Maurel –s’emparent de la vie d’une troisième et qu’elles s’y emploient avec autant de finesse et de précision, ça donne un bel ouvrage, basé pour l’essentiel sur un reportage en immersion, celle de Nelly Bly (le pseudo journalistique d’Elisabeth Cochrane), et la nôtre pour le coup, dans le monde la folie telle qu’elle est fabriquée par la société qui ne sait que faire des femmes de trop. Ou de peu. L’indiscutable réalité des faits relatés – le quotidien des internées de l’institut de Blackwell (New-York) à la fin du XIXe siècle — est parfaitement glaçante. Et l’on se demandera toujours pourquoi quelqu’un un jour se lève et empoigne la vie dans le sens que les conventions ne lui avaient pas indiqué : c’est qu’il faut être folle pour jouer à la folle dans ce monde-là ! Est-ce parce que, comme le déclare Nelly Bly, pour ses parents « être fille ne supposait pas servitude, devoir et pudeur et qu’ils lui offrirent la liberté d’être elle, de s’inventer ? » Est-ce parce qu’un jour un irrésistible « quant-à-soi » a fait surgir l’indignation, ce « tout mais pas ça » qui finit par tracer les chemins de l’émancipation ? Est-ce tout cela à la fois, et ce elle qu’elle a pu être, qui ont un jour fait de Mlle Cochrane Nelly Bly ? Lisez, vous trouverez peut-être des réponses…
Jean-François PontegnieNelly Bly - Dans l’antre de la folie
Virginie Ollagnier et Carole Maurel
Glénat, 2021