Alberto Prunetti a vécu à Londres dans les années 1980. Premier universitaire d’une famille ouvrière de Toscane — son père était métallurgiste et était fier de construire des rails de chemin de fer -, il raconte cette période rocambolesque dans Odyssée lumpen, un véritable conte relatant les péripéties des travailleurs au salaire minimum. « Précaires de tous les pays unissez-vous » aurait dit l’autre. Indigné par ses conditions de travail exécrables, mal payé, exploité et surveillé par ses patrons, il dénonce à coups de traits d’esprit et de répliques cinglantes ce qu’il appelle l’esclavage du salariat à taux minimum, de même que « l’atmosphère d’abrutissement » des milieux de travail où il atterrit. Un roman divertissant, socialement engagé mais surtout hilarant, truculent et jubilatoire. Les mots virevoltent entre la langue de Molière et celles de Shakespeare et Dante. Les mots se croisent, se heurtent. Le résultat, d’abord déroutant, s’avère vite d’une couleur et d’une beauté uniques. Ces tribulations épiques nous font rencontrer entre autres un pizzaïolo, un laveur de toilettes et un cueilleur de framboises. En début et en fin de récit, Prunetti évoque son père, la fierté de la classe ouvrière et l’importance de la transmission de ses valeurs. Vibrant, émouvant, exaltant.
Olivier StarquitOdyssée Lumpen
Alberto Prunetti
Lux éditions, 2024