Attention, pépite ! La collection le mot est faible chez Anamosa a une nouvelle fois visé juste avec la publication, cette fois consacrée au mot ou plus précisément à l’adjectif public. L’auteur souligne ainsi dès l’entame qu’« après trois décennies de mue néolibérale, l’adjectif public peine à définir les réalités qu’il désigne ; il ne détermine plus en effet un régime juridique, ni un mode de production, ni un horizon social, ni même un circuit politique ». Devenu un signifiant flottant, il reste mobilisé sans cesse mais aussi sans conséquence. Sous couvert de l’analyse des péripéties encourues par le terme, l’auteur passe au crible le néolibéralisme, les privatisations, sans oublier les mutations imposées au service public, sorte de « privatisation endogène diffusant en son sein les méthodes, les normes, voire les modèles idéologiques de l’entreprise et des marchés privés ». Cette auscultation expose aussi une prophétie autoréalisatrice : en court-circuitant et en asséchant les administrations, les gouvernements accélèrent leur impéritie et leur mise hors-jeu au profit du privé. Face à cela, que faire ? Non pas invoquer un âge d’or disparu qui risque de condamner « au régime de la dénonciation et de la déploration en cantonnant l’imaginaire politique à un registre essentiellement défensif » mais plutôt explorer les voies d’une republicisation au service de la communauté et des enjeux qui affectent nos vies pour enfin sortir du sommeil dogmatique. « Le public n’est pas qu’un mot, il engage bel et bien ceux qui l’invoquent ». Cet ouvrage est un livre que tous les défenseurs des services publics attendaient depuis longtemps.
Olivier StarquitPublic
Antoine Vauchez
Anamosa, 2022