
Septembre 2001, les États-Unis ont déclenché leur Guerre contre le terrorisme. Vous êtes un pilote de drone militaire prêt à bombarder un village pour en éliminer les terroristes, programme habituel de tant de jeux vidéo. Bienvenu dans September 12th. En 2003, un groupe de créateurs et créatrices uruguayens rassemblés autour de Gonzalo Frasca décide de mettre en œuvre le concept de newsgames, des jeux vidéo journalistiques évoquant un fait d’actualité. Seuls deux jeux seront produits avant la mise en sommeil du collectif, dont September 12th. Jeu vidéo d’action a priori classique, il reprend les codes visuels des images diffusées par les JT, l’orientalisme d’un Irak de pacotille, le manichéisme politique de la question du terrorisme et l’évidence de la violence militaire pour y répondre. Avant de les pervertir une fois la partie lancée. Car loin de ressentir le plaisir régressif habituellement dispensé par les jeux de guerre, le joueur se voit frustré de ne pouvoir raser le village ni tuer les ennemis sans toucher les civils. Et chaque victime civile déclenche les larmes des habitants de la ville l’environnant avant de les transformer en combattants. Évitant toute explication et s’exprimant quasi exclusivement qu’avec des moyens vidéoludiques, September 12th illustre la puissance des mécanismes des jeux vidéo comme outils politiques. Certes, la simplicité, voire la simplification, de la représentation de September 12th peut dérouter. Mais rarement une œuvre aura démonté une propagande aussi puissante avec une telle économie de moyens, déconstruit le cycle sans fin de la violence et rendu aussi évidente l’impasse de la Guerre contre le terrorisme.
Julien AnnartSeptember 12th : A Toy World
Newsgaming, 2003