
We. the Revolution vous propose d’incarner un juge, alcoolique et joueur, durant la Révolution française et en particulier durant la période de la Terreur. Très vite, vous allez comprendre, en tant que joueur·euse, qu’il ne va pas tant s’agir de rendre justice que de naviguer entre les intérêts contradictoires sans chavirer : le peuple, les révolutionnaires, l’aristocratie… et même votre famille ! Appliquer la loi et rendre la justice ? Si possible. Mais avant tout ménager les camps en présence et survivre. Pour garantir sa survie et celle de sa famille, votre personnage va ainsi chercher toujours plus de pouvoir, dans une fuite en avant faite de conspirations et de trahisons. Ce que les mécanismes du jeu excellent à rendre, vous amenant pernicieusement à prendre des décisions de plus en plus sanglantes dont découleront d’autres choix inhumains. Contrairement à beaucoup de jeux, acquérir plus de pouvoir ne vous rendra donc pas plus fort mais simplement plus exposé à la violence, renforçant progressivement une atmosphère de paranoïa étouffante. Au final, We. the Revolution, plus qu’un jeu historique, se présente comme une fresque sombre sur le Pouvoir et la Justice. En exhibant crûment l’avidité et la violence des dirigeants des institutions, il critique explicitement l’hypocrisie de leurs discours déconnectés de leurs actes. Ni nihiliste (« tous pourris »), ni conservateur (« la violence de la révolution disqualifie toute contestation politique »), We. the Revolution s’en prend aux institutions et aux personnes qui les incarnent. Et en particulier à la Justice, plus sensible aux positions sociales qu’aux actes, plus occupée à maintenir l’ordre qu’à appliquer la loi, moins un juge de la société que son reflet.
Julien AnnartWe. the Revolution
Polyslash, Pologne, 2019