
Dans la collection LitPol qu’il anime, Erik Rydberg souhaite remettre à l’honneur les théoriciens du mouvement ouvrier en un temps où les « armes de la critique » s’avèrent plus que jamais nécessaires. Le nom, LitPol, a été choisi en hommage au Verlag für Literatur und Politik (dont c’était l’abrégé) fondé à Vienne en août 1924 et liquidé par le régime nazi en juin 1934.
Zeitgeist, le petit opus qu’il y publie, vient rejoindre ces ouvrages qui de plus en plus, considèrent que le langage est un terrain de combat. Mais, outre la dénonciation des mots que l’on retrouve dans les écrits de nos adversaires — cette propagande langagière qui jette un voile opaque sur le sens des mots -, ou encore la détection des tics de langage et des anglicismes, il va plus loin et s’attaque à ce qu’il appelle les « mots sous-marins », ces termes d’allure progressiste qui, parachutés par la sphère dominante, viennent gangréner les discours de gauche sans en avoir l’air. Pensons notamment à la « cohésion sociale » ou encore à la « société ouverte ». Nul doute que certaines positions pourraient susciter la polémique (ce qui n’est absolument pas dramatique, bien au contraire !) Il réserve également un sort cinglant à ces mots absolutisés qui foisonnent et dont le but principal est surtout de ne pas nous inviter à réfléchir. Avec verve, érudition et truculence, Erik Rydberg jette un bon coup de pied dans la fourmilière et nous incite plus que jamais à réfléchir deux fois avant d’opter pour tel ou tel mot. Bref, un bel objet à dévorer au coin du feu.
Olivier StarquitZeitgeist, Vocabulaire des Anti-Lumières
Erik Rydberg
LitPol, 2019