Journées du Matrimoine

Retour sur un projet pour une ville plus égalitaire

Photo : Julia Helber

Il y a cinq ans, l’architecte fémi­niste Apol­line Vran­ken lance les Jour­nées du Matri­moine, ins­pi­rée par un article de la jour­na­liste Maï­té War­land publié sur le site des Gre­nades inti­tu­lé « À quand des Jour­nées du Matri­moine en Bel­gique ? » évo­quant l’initiative pari­sienne. Aujourd’hui, cet évé­ne­ment est ancré dans la vie cultu­relle et mili­tante bruxel­loise et a per­co­lé en région. Depuis trois ans, le col­lec­tif Char­lie­queen (fémi­nin de Char­le­roi, pour cel­leux qui n’auraient pas la réf’) dont fait par­tie la régio­nale PAC de Char­le­roi en par­te­na­riat avec Sora­lia Char­le­roi, porte des Jour­nées du Matri­moine sur le ter­ri­toire caro­lo et Mons vient d’accueillir sa pre­mière édi­tion, à l’initiative de la régio­nale PAC de Mons, de Picar­die Laïque et de Sora­lia. Des réa­li­tés de ter­rain dif­fé­rentes et pour­tant de mêmes objec­tifs de visi­bi­li­sa­tion, de lutte, d’émancipation col­lec­tive sur ces trois ter­ri­toires que nous racontent Apol­line Vran­ken de la pla­te­forme l’Architecture qui dégenre, Marie Demous­tiez et Maria­ne­la Gal­le­gos de la régio­nale PAC de Mons et Mar­gaux Joa­chim de la régio­nale PAC de Charleroi.

Pourquoi des Journées du Matrimoine et pourquoi à Bruxelles ?

Apol­line Vran­ken : La genèse est assez mar­rante. Je suis tom­bée sur cet article de Maï­té War­land et tout spon­ta­né­ment, je l’ai par­ta­gé sur mon pro­fil Face­book en mode « Qui est chaud ? ». J’étais très moti­vée et j’ai lan­cé un appel pour trou­ver des per­sonnes qui vou­draient orga­ni­ser ça avec moi. Je m’étais ren­du compte que j’avais des choses à racon­ter, que j’avais déjà fait des visites gui­dées fémi­nistes, que je pour­rais appe­ler ma prof d’histoire, et, en fait, je voyais déjà une petite pro­gram­ma­tion se des­si­ner. Et puis une cama­rade de cours m’a écrit en me disant qu’elle était par­tante et voi­là ! En deux mois, on lan­çait les Jour­nées du Matri­moine. Tout ça a été très spon­ta­né. Et fran­che­ment, au moment où je l’ai lan­cé, je ne me suis jamais dit que ça devien­drait ce que c’est aujourd’­hui. Il n’y avait pas de vision.

Si cela s’est fait à Bruxelles, c’est parce que je suis bruxel­loise et que ma connais­sance du ter­ri­toire à la fois géo­gra­phique, asso­cia­tif et cultu­rel est ancrée dans la capi­tale. Quand on parle d’his­toire des femmes et des mino­ri­tés, ça demande de faire appel à des exper­tises, une simple recherche sur Google ne donne pas de résul­tat. Et cette exper­tise, elle est dans le chef de per­sonnes qui vivent là, qui tra­vaillent là, ou dont c’est le ter­ri­toire de recherche. Ce qui était mon cas.

Quel était l’objectif de départ ?

AV : Dès la pre­mière édi­tion, dans notre ADN, il y avait l’objectif de par­ler du matri­moine his­to­rique et du matri­moine contem­po­rain, des enjeux des luttes fémi­nistes actuelles. Ce n’était peut-être pas for­mu­lé en termes d’objectifs, mais il y avait autant ces enjeux contem­po­rains de droit à la ville, de réflexion par le prisme du genre sur les luttes urbaines, que la ques­tion des bégui­nages et tous les enjeux matri­mo­niaux et his­to­riques. Au fil des édi­tions, nous essayons tou­jours d’améliorer nos pro­po­si­tions. Il y a des choses qui vont être très opé­ra­tion­nelles, nous essayons de faire davan­tage d’ac­ti­vi­tés en néer­lan­dais, plus d’a­ni­ma­tions, et puis il y a des choses qui sont de l’ordre d’une vision stra­té­gique, à savoir mettre en place des acti­vi­tés jeu­nesse, réflé­chir en termes d’ac­ces­si­bi­li­té au sens large, avec des col­lec­tifs comme F.R.I.D.A. (Fémi­niste Radi­ca­le­ment Inclu­sive et Défi­ni­ti­ve­ment Anti-vali­diste) et Fat Friend­ly (col­lec­tif de lutte contre la gros­so­pho­bie), inté­grer la ques­tion de l’ac­ces­si­bi­li­té pour les familles, et plus par­ti­cu­liè­re­ment pour les familles mono­ma­ren­tales [en regard au terme mono­pa­ren­tal, puisque les parents solos sont majo­ri­tai­re­ment des femmes — NDLR], une gar­de­rie pour les enfants. Ce qui a chan­gé aus­si, c’est que, depuis 2021 nous nous sommes entou­rées d’un comi­té d’ac­com­pa­gne­ment qui amène vrai­ment une vision trans­ver­sale, et qui nous per­met aus­si d’a­voir une pro­gram­ma­tion inter­sec­tion­nelle, tout en gar­dant en tête de ne pas deve­nir un fes­ti­val fémi­niste plu­ri­dis­ci­pli­naire, mais de gar­der notre empreinte « matrimoine ».

Cela fait maintenant trois ans que des Journées du Matrimoine sont organisées à Charleroi et, cette année, une première édition a eu lieu à Mons. Qu’est-ce qui vous a incitées à vous lancer ?

Marie Demous­tiez : Il y a quelques années, nous avons inté­gré le Conseil consul­ta­tif pour l’égalité hommes/femmes de Mons, mais on s’est vite ren­du compte que le tra­vail au sein de cette pla­te­forme était com­pli­qué, en termes de timing et de par­te­na­riat, notam­ment. Du coup, on a déci­dé de mener cer­tains pro­jets avec eux, et à côté de ça, on a rédi­gé une note d’intention que nous avons sou­mise à Picar­die Laïque. On l’a retra­vaillée ensemble pour qu’elle convienne à nos deux struc­tures, puis nous avons pro­po­sé à Sora­lia de nous rejoindre. L’idée était de réflé­chir ensemble à un pro­gramme d’activités lié à de futures Jour­nées du Matri­moine parce qu’on avait les mêmes objec­tifs, à savoir faire res­sor­tir l’invisibilité des femmes au niveau de la ville de Mons, mais aus­si se ques­tion­ner par rap­port à son his­toire. C’est là qu’est né le double pro­jet, d’une part celui des oubliées de l’histoire et d’autre par celui de la Ducasse inclu­sive. On s’est ins­pi­rée de ce qui se fait à Bruxelles, mais sans en faire un copier-col­ler. On vou­lait faire ça à notre sauce, en res­tant ancrées au sein de nos territoires.

Mar­gaux Joa­chim : Il y a dix ans, nous avons créé un col­lec­tif qui s’appelle Char­lie­queen. Notre idée de départ était de réflé­chir la place des femmes dans l’es­pace public. On a fait pas mal d’ac­tions, il y a plein de choses qui ont été créées à par­tir de là dont une expo­si­tion, nous avons aus­si inté­gré la Com­mis­sion odo­ny­mique [Branche de la topo­ny­mie qui s’intéresse aux noms des rues — NDLR) pour pou­voir chan­ger les noms des rues. La pre­mière fois qu’on a enten­du par­ler des Jour­nées du Matri­moine, c’est à l’occasion de celles de Paris, avant qu’elles n’arrivent à Bruxelles. Et pour nous, ça a tout de suite été une évi­dence qu’on arri­vait à un stade où on avait de quoi mon­ter un évé­ne­ment de ce type.

On s’ins­pire assez fort de l’es­prit bruxel­lois, entre autres avec la ques­tion du matri­moine his­to­rique, archi­tec­tu­ral, social comme elles le font à Bruxelles, mais aus­si toute la ques­tion de l’ap­pro­pria­tion de l’es­pace public par les femmes en par­tant du prin­cipe que demain, on n’a plus envie de devoir refaire le même constat. Ain­si, il y a une jour­née qu’on attri­bue à la ques­tion de l’ur­ba­nisme sen­sible au genre, tan­dis que le reste du week-end est consa­cré à la ques­tion des métiers et du matri­moine com­mun historique.

Qu’est-ce qui vous distingue de ce qui se fait à Bruxelles ?

MJ : Je dirais qu’on s’in­dé­pen­dan­tise parce que nous for­mons un groupe citoyen et que notre pro­gram­ma­tion, éla­bo­rée par les membres de ce groupe, s’inscrit dans notre tra­vail d’éducation per­ma­nente, ce qui, cela dit en pas­sant, n’est pas tou­jours facile. À Bruxelles, je pense qu’elles ont moins cette dimen­sion. Et sur­tout, on essaye, comme le disait Marie, de col­ler au ter­ri­toire caro­lo. Nous ne sommes pas du tout sur les mêmes réa­li­tés et nous ne tou­chons pas le même public.

Maria­ne­la Gal­le­gos : Il me semble impor­tant de men­tion­ner qu’au début, si l’objectif était la construc­tion de Jour­nées du Matri­moine, on s’est vite ren­du compte qu’il y avait tout un pro­ces­sus à construire avant. À com­men­cer par la rédac­tion d’une note d’intention poli­tique. Au début, notre note d’intention ne men­tion­nait pas du tout la ques­tion déco­lo­niale ni celle des femmes raci­sées. C’est nous qui avons ame­né ces thé­ma­tiques, tout comme celle du matri­moine intime. Ce sont ces ajouts qui ont per­mis de construire ces deux expo­si­tions « Héroïnes oubliées » et « Ducasse inclu­sive » et le pod­cast « Héroïnes oubliées du Matri­moine Mon­tois », en gar­dant tou­jours en tête ce que nous apportent les femmes qui ne sont pas belges aujourd’­hui. C’est tout ce volet édu­ca­tion per­ma­nente der­rière qu’on a essayé de faire col­ler avec ce qu’on fait. C’é­tait essentiel.

Est-ce que tu as l’impression que les choses ont évolué en cinq ans ? Au sein de la société civile, au niveau politique, les Journées du Matrimoine ont-elles eu un impact ?

AV : Oui et d’abord parce qu’il y a eu les petites sœurs à Mons et à Char­le­roi. D’ailleurs, à Char­le­roi, je dirais même que c’est juste une sœur. Sans se cal­quer à notre vision, mais en se disant qu’elles voyaient l’intérêt de par­ler d’hier et d’aujourd’hui, celui de la loupe inter­sec­tion­nelle, de faire à la fois des visites gui­dées mais aus­si des ate­liers ou des évé­ne­ments grand public, elles se sont lan­cées. Je pense que notre force, c’est de sor­tir de cette idée muséale qui peut poten­tiel­le­ment aus­si être un frein à une série de pro­fils par­mi notre public. Une de nos plus belles réus­sites, c’est d’être deve­nues, l’Ar­chi­tec­ture qui dégenre et les Jour­nées du Matri­moine à Bruxelles, un pont entre le monde aca­dé­mique, le monde cultu­rel, le monde asso­cia­tif, et même les écoles d’art et de conser­va­tion. On ras­semble toute une série de pro­fils, en ce com­pris les afi­cio­na­dos des Jour­nées du Patri­moine, nou­vel­le­ment rebap­ti­sées « Heri­tage Days », et c’est un beau suc­cès à mes yeux. Notre force, c’est de décloi­son­ner, et au-delà, de créer des col­la­bo­ra­tions. Par exemple, nous avons des conven­tions tri­par­tites avec diverses admi­nis­tra­tions, notam­ment la cel­lule archi­tec­ture et la cel­lule éga­li­té des genres de la Fédé­ra­tion Wal­lo­nie-Bruxelles. Et au fil du temps, on s’est ren­du compte que c’était des direc­tions qui n’a­vaient jamais tra­vaillé ensemble. Et donc nous, on crée des ponts même au sein des admi­nis­tra­tions, et ça, c’est génial. Il y a clai­re­ment du gen­der-mains­trea­ming [Stra­té­gie qui vise à ren­for­cer l’égalité entre les hommes et les femmes en réser­vant une place à la dimen­sion de genre dans la poli­tique gou­ver­ne­men­tale — NDLR] à aller faire par­tout, et il y a des enjeux urbains à aller défendre aus­si du côté de l’é­ga­li­té. Donc oui, ça bouge, mais c’est fra­gile. Et effec­ti­ve­ment, quand Urban.brussels (l’administration qui sou­tient le déve­lop­pe­ment ter­ri­to­rial de la Région Bruxelles Capi­tale) nous a dit que Heri­tage Days incluait tout le monde, nous, on a main­te­nu qu’on n’allait pas arrê­ter d’aller faire du gen­der-mains­trea­ming au sein de leur pro­gram­ma­tion en conti­nuant d’a­voir une action spé­ci­fique parce que les deux sont néces­saires. À la fois ren­trer dans la grande his­toire, mais aus­si conti­nuer à mon­trer que c’est une lutte, que rien n’est encore conquis et qu’on doit encore se battre.

À Charleroi, vous venez de clôturer votre troisième édition. As-tu pu percevoir des changements concrets que vos luttes auraient permis de faire exister ?

MJ : Le plus concret, c’est le chan­ge­ment de noms de rues. On fait par­tie de la Com­mis­sion odo­ny­mique, cela prend du temps de faire bou­ger les lignes, mais il y a des choses qui sont en cours et cer­tains noms ont déjà été attri­bués. Ce qui est inté­res­sant aus­si, c’est que nous inter­pel­lons des musées, ou des acteurs du tou­risme pour leur pro­po­ser de réflé­chir à la ques­tion du genre dans leurs balades et leurs visites. Si ce n’est pas quelque chose sur laquelle ils sont for­cé­ment à l’aise, ils font un tra­vail spé­ci­fique pour les Jour­nées du Matri­moine. Je pense notam­ment à une balade sur la ver­re­rie du côté de Lode­lin­sart. Un des guides s’est com­plè­te­ment pris au jeu, il a fait plein de recherches alors que c’était une chose à laquelle il n’a­vait jamais pen­sé. Et voi­là, main­te­nant, sa visite est au fémi­nin et elle est super intéressante.

On ne tra­vaille pas chaque année avec les musées, mais je pense que ça per­met de mettre un angle là où ils ne sont pas tou­jours hyper atten­tifs. Donc oui, concrè­te­ment, je pense que ça fait évo­luer les choses. Le public aus­si est dif­fé­rent. Là où, sur la ques­tion fémi­niste, notam­ment lors de notre évé­ne­ment « Femmes de Mars », on retrouve un public convain­cu, les Jour­nées du Matri­moine ras­semblent un tout autre public. Sur la ques­tion déco­lo­niale, on tra­vaille avec I See You, une asso­cia­tion afro­des­cen­dante caro­lo. Grâce à elles ain­si qu’à leurs par­te­naires de Bel­gian Entre­pre­noires et aFree­Kam, une nou­velle sta­tue de Kim­pa Vita a été inau­gu­rée pen­dant les Jour­nées du Matri­moine 2024 dans le parc de Couillet. Elles ont fait un gros tra­vail sans nous, mais on a sans doute per­mis l’é­mer­gence de ça, et elles nous le recon­naissent. C’est super chouette. Tout le bou­lot leur revient, mais c’est gai parce qu’on a vrai­ment été asso­ciées et elles ont orga­ni­sé une jour­née com­plète autour de la figure de Kim­pa Vita lors de cette édi­tion 2024. Ça, c’est quand même très concret. On est très fières que cette sta­tue puisse être là. Elle fait d’ailleurs par­tie d’un réseau mon­dial de sta­tues de Kim­pa Vita.

Et à Mons, après votre première édition, vous sentez des lignes bouger ? Vous parliez de décolonisation, vous pensez avoir pu amener ce genre de question davantage à l’avant-plan ?

MG : Je pense que c’est encore trop tôt parce que nous avons tou­ché des publics dif­fé­rents, mais c’é­tait aus­si stra­té­gique. Nous avions contac­té d’autres struc­tures pour tou­cher d’autres per­sonnes. Mais l’i­dée, c’est de conti­nuer à tra­vailler, sur­tout dans le contexte actuel. Nous aus­si, on est en contact avec I See You, donc c’est bien, ça fera lien. On vou­drait créer une balade fémi­niste déco­lo­niale à Mons. Cela fait par­tie de nos pro­jets pour l’an­née prochaine.

Et pour rebondir, auriez-vous envie de nous raconter quelque chose qui vous a marqué lors de cette première édition ?

MG : Lors d’un ate­lier sur la ques­tion du matri­moine ici et ailleurs, nous avions convié des inter­ve­nantes d’o­ri­gine étran­gère. Or, les per­sonnes qui par­ti­ci­paient étaient des per­sonnes en inser­tion socio­pro­fes­sion­nelle d’origine belge. Cela nous a per­mis d’amener la ques­tion déco­lo­niale au sein de nos Jour­nées du Matri­moine. C’est un tra­vail de très longue haleine et cela m’a lais­sé des ques­tion­ne­ments pour la suite et com­ment ame­ner cette ques­tion dans le pro­jet matri­moine sans qu’il ne soit ques­tion de « faire la morale » à d’autres gens sur ce thème-là.

MD : J’ai été très émue par la réac­tion du groupe de filles qui avaient lan­cé une péti­tion pour deve­nir actrices du petit Dou­dou. Mal­me­nées sur les réseaux sociaux, elles ont été très tou­chées par la fresque. Elles nous ont dit se sen­tir sou­te­nues et écou­tées dans leurs com­bats parce qu’elles trouvent inac­cep­table de ne pas pou­voir prendre part au folk­lore parce qu’elles sont des femmes.

Y aurait-il, Margaux, sur ces trois éditions, un moment qui t’aurait touché plutôt qu’un autre ?

MJ : On a pas mal tra­vaillé la ques­tion de l’im­mi­gra­tion, année après année. L’an der­nier, nous avons pro­duit une créa­tion sonore, « Ciao Nona », qui traite du matri­moine à tra­vers trois géné­ra­tions de femmes ita­liennes. Le groupe Char­lie­queen y inter­viewe une grand-mère – la nona –, une fille et sa petite-fille. Cette créa­tion a été dif­fu­sée en pré­sence de la nona, mais aus­si de pas mal de per­sonnes de la com­mu­nau­té turque, cer­taines de la pre­mière géné­ra­tion, dont une qui est ensuite venue pré­sen­ter son his­toire. Et c’é­tait dingue de simi­li­tude, c’é­tait beau, c’é­tait très émou­vant. On était une qua­ran­taine, et ça a été pour moi un des moments les plus forts. C’é­tait plu­tôt du matri­moine intime, mais, en même temps, l’his­toire de l’im­mi­gra­tion à Char­le­roi, comme par­tout, c’est inté­res­sant et important.

Apolline, aurais-tu envie de nous partager un élément marquant pour toi dans cette aventure ?

AV : Ce dont je me rends compte, c’est que tant par­mi les membres de l’Architecture qui dégenre, que par­mi les équipes de Char­le­roi et de Mons, il y a cette même volon­té de se mouiller en termes de conte­nus et en termes poli­tiques. C’est une prise de risque que j’aime bien. Et puis, ce que j’aime bien aus­si dans nos trois orga­ni­sa­tions, c’est qu’on fait quelque chose de digne. C’est-à-dire qu’on n’est pas là avec des bouts de ficelles, à faire un peu ceci, un peu cela, à mal payer les gens, etc. Non, on paye l’ex­per­tise, on est ali­gnées avec une éthique fémi­niste sur le plan pro­fes­sion­nel, mais au-delà de ça, on vise une qua­li­té exem­plaire dans ce qu’on pro­pose au public. Et ça, mal­heu­reu­se­ment, ce n’est pas le cas par­tout. Nous avons ce côté « On y va, on se mouille », mais aus­si « Si on le fait, on le fait bien ». Plu­tôt qu’un moment mar­quant, j’ai envie de gar­der que quand j’y vais, je suis fière, je me sens digne et je me dis qu’il faut main­te­nir le cap que je pour­suis, parce que c’est une façon de prendre soin de nos mémoires, mais aus­si de nous en tant que tra­vailleu­reuses et du public. Et fran­che­ment, main­te­nir ce cap consti­tue un cercle vertueux.

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